Dans un monde volatile, incertain, complexe et ambigu, les équipes de travail doivent démontrer solidité et cohérence. Comment diriger au mieux son équipe pour transcender le contexte et performer ensemble ?
Les équipes expérimentent de nombreuses difficultés à la coopération dans leur travail. Travailler en équipe nécessite donc de les examiner pour les lever, si possible. Celui ou celle qui dirige la structure va y être confronté.e au quotidien.
Aussi, comment faciliter auprès de chacun une prise de conscience confiante dans son potentiel d’évolution et de changement et co-construire un chemin partagé vers une amélioration continue du bien travailler et vivre ensemble ?
L’approche systémique, un guide pour diriger une équipe
En cas de conflit dans son équipe, le premier réflexe de la direction sera de chercher la cause de la problématique : cibler le fonctionnement d’un individu ou de l’équipe, les enjeux actuels, la pression exercée par les gestionnaires, les parents etc…
Or, pour comprendre un phénomène, l’approche systémique nous propose d’abandonner la recherche de la cause, au profit des paramètres influents et de nous concentrer sur le changement.
L’approche systémique du changement consiste à répondre à une demande en s’appuyant sur les composants fondamentaux du système afin d’élaborer et mettre en œuvre une stratégie destinée à mobiliser le ou les acteurs concernés dans une direction précisée avec le demandeur. Elle nécessite la mise en place d’ajustements successifs pour réguler les résistances spontanées ou organisées des acteurs et pour s’adapter aux pressions et/ou aux évolutions de son environnement.
Pour appréhender les dysfonctionnements d’une équipe et leur évolution possible nous pouvons nous appuyer sur les principes de compréhension de l’Élément Humain®, une approche systémique du développement des personnes, des équipes et des organisations qui fait le lien entre estime de soi, performance individuelle et réussite collective créée et développée par William Schutz, psychologue américain.
Faciliter plutôt que diriger
Dans le cadre de mes analyses de pratiques, je perçois souvent une certaine ambivalence chez les équipes, qui semblent ne connaître que 2 postures possibles : Les équipes ayant une direction plutôt non directive ont tendance à souhaiter une personne qui tranche, prend des décisions et guide l’équipe, alors que ceux qui travaillent avec ce profil de personne souhaitent plus d’écoute et moins de directivité. Difficile de trouver l’équilibre et une manière de diriger qui prenne en compte les intérêts et les contraintes de chacun. Ce n’est pas l’équilibre entre une posture et une autre qui est à trouver, mais un autre positionnement, c’est-à-dire de faciliter plutôt que diriger.
En quoi consiste cette nouvelle posture ?
Pour Will Schutz, trouver les meilleures solutions aux problèmes organisationnels passe par un renforcement de la conscience de soi, aussi bien pour les responsables que pour les membres de l’équipe. Cette profonde conscience de soi permet l’acceptation de soi et l’estime de soi. Les membres de l’équipe devenant plus conscients et disposant d’une plus grande estime d’eux mêmes seront plus ouverts et plus honnêtes avec leurs collègues. L’énergie mobilisée préalablement par des stratégies défensives (protection, préservation de l’information, luttes interpersonnelles pourra alors être redirigée par un travail plus productif. Avec l’élément humain trois catégories de buts sont poursuivies, des buts individuels, des buts relationnels et des buts organisationnels. Concernant ces derniers, l’organisation doit favoriser pour chacun des membres une estime de soi au travers de la participation, de la liberté, de l’ouverture de la reconnaissance et de la responsabilisation selon trois dimensions : l’inclusion, le contrôle et l’ouverture.
Une direction facilitatrice
Inclut
Elle travaille à la mise en sécurité affective des membres de l’équipe, par la reconnaissance, la bienveillance et l’accueil mutuel, oser s’accorder 5 mn pour se connecter à l’humanité de l’autre (être) avant d’envisager son rôle (faire)
Ouvre à l’échange
Elle facilite ce travail de maïeutique et de partage de la parole où le sujet du moment est placé au centre et se révèle au collectif par le questionnement authentique, l’intérêt porté à la parole de l’autre et l’enrichissement de ses apports.
Favorise l’émergence
Une émergence est une possibilité nouvelle, un éclairage différent qui s’exprime lorsque les conditions sont réunies. Elle autorise l’inédit au détour d’échanges informels, mais également de la capacité du facilitateur de se saisir des signaux faibles pour les transformer en opportunités d’apprentissage.
Soutient
Elle donne les autorisations et les protections nécessaires, fluidifie les processus, articule et relie, rend les choses possibles, sans les vouloir ou les diriger, bref se met à disposition pour faire exister et briller les autres.
Rythme
Elle fait cohabiter les temps de divergence (ouvrir), d’émergence (révéler) et de convergence (fermer) par une posture spécifique à chaque moment, une maîtrise de l’alternance et des énergies.
Régule et ajuste
Elle ramène l’équipe vers ses missions et ses règles, quand celles-ci sont transgressées, quand les échanges ne sont plus au bon niveau, quand la cible n’est plus alignée.
Méta communique
Elle communique et donne du feed-back sur les processus de communication en cours, aide l’équipe dans sa prise de hauteur, recadre les perspectives et le sens et permettre une autre lecture des situations.
Libère les émotions
Elle sent l’état interne de l’équipe, accepte ses émotions, reconnaît et fête les réussites, surfe sur les joies, les peines, les doutes, pour renforcer l’intensité et le goût des expériences.
Modélise les apprentissages
Elle aide l’équipe dans sa réflexivité et son objectivation des connaissances émergentes, pour prendre conscience du chemin parcouru et préparer la socialisation des connaissances développées.
Cela implique de pouvoir mieux se connaître pour mieux travailler avec ses limites et ses forces et diriger en conscience et avec intentionnalité. Cela suppose de pouvoir à la fois s’appuyer sur les ressources des professionnel.le.s mais aussi pouvoir s’assurer que l’orientation prise en commun soit appliquée.
Bibliographie :
Dominique Bériot, Manager par l’approche systémique, Eyrolle 2006
Patrick Dugois, Philippe Béon et Thierry Gauthron, La transformation permanente, EMS, 2016.
Gary Hamel, La fin du management, inventer les règles de demain, Vuibert 2008
William Schutz, L’élément humain – Comprendre le lien entre estime de soi, confiance et performance, Interéditions 2018