
Mon Bilan 2018
J’ai démarré doucement l’année par quelques ateliers pour
faire vivre la thérapie sociale à des professionnels de la petite enfance, aux
entrepreneurs de ma coopérative, et également lors d’ateliers à destination de
particuliers. Animer un atelier avec des amis proches
a été un défi plus que
stimulant. Les retours et effets positifs, corrélés au sentiment d’utilité et
de bien-être que j’ai pu ressentir, m’ont encouragé à poursuivre dans cette
voie.
Je me suis également donnée l’occasion de mettre en place la démarche au sein du CA de mon église qui avance dans de multiples transitions : renouvellement des forces vives, passages vers de nouveaux locaux, visibilité et cohérence des projets… Pouvoir se sentir utile et à sa place dans un système qui me tient particulièrement à cœur, sur des sujets qui touchent notre identité et notre âme, est un réel privilège et je suis particulièrement touchée et reconnaissante d’avoir pu mettre ma sensibilité et mes compétences au service de cette œuvre.
J’ai aussi eu l’opportunité de côtoyer un milieu que je souhaite approcher depuis longtemps, le domaine de la protection de l’enfance . Par le biais d’accompagnement de travaux d’ étudiants en travail social , j’ai pu découvrir ce milieu confronté à une telle complexité, de tels enjeux, accompagné de questionnement incessants, de sentiment d’impuissance ou de toute puissance des professionnels, d’innovation et de recherche, de dynamique participative et de résilience. Là encore on touche à l’identité, au cœur, à l’âme, au noyau dur…tout ce que j’aime. Je suis particulièrement impatiente de commencer à travailler avec les dirigeants d’une maison d’enfant ce printemps, à l’histoire riche et complexe à la fois.
La parentalité , domaine connu que je côtoie depuis longtemps mais avec d’autant plus de sensibilité depuis que je la vis moi-même est venue me solliciter par le biais d’une association citoyenne de quartier. Là, j’ai pu évoluer en terrain plus familier, mais toujours avec des enjeux et une configuration particulière, confrontante et stimulante.
J’ai pu ensuite glisser vers de nouveaux domaines d’activités que je ne connaissais pas, à savoir celui de la fonction publique hospitalière et territoriale .
Ce qui m’a particulièrement marqué c’est la motivation et l’engagement dans le travail des agents, avec une volonté d’avancer et de faire équipe malgré le sentiment d’être bloqués par un système de plus en plus sclérosé et phagocyté par les exigences de rentabilité à court terme. J’ai pu les encourager à s’accorder à elles-mêmes la reconnaissance tant attendue du haut et les accompagner dans la mise en place d’objectifs de travail commun qui faisaient sens pour chacun et permettait d’améliorer leur opérationnalité au quotidien.
C’est surprenant de voir à quel point la mise en place d’espaces de dialogues dans un cadre sécurisant permet de dénouer malentendus et ressentis, bien souvent facteurs de démotivations et de perte de sens. Trouver les causes ensemble et mettre en place des solutions adaptés aux besoins réels est un processus particulièrement passionnant. D’autant plus, quand le cadre permet une continuité. En effet j’ai la chance de pouvoir continuer avec ces équipes en 2019 pour permettre la consolidation de la confiance et le développement de l’intelligence collective.
Dans chaque groupe j’ai été stupéfaite de voir à quel point les sujets émergeaient au bon moment, à quel point les choses se recoupaient entre les exercices proposés et les problématiques réelles, à quel point aussi on ne voit plus les petites choses faciles et simples à mettre en œuvre pour faciliter la communication au quotidien quand on a la tête dans le guidon, à quel point la perception de l’autre peut être altérée par les craintes qui nous assaillent, à quel point la dynamique peut s’essouffler et être gangrénée rapidement, mais aussi reprendre et resurgir après dépoussiérage des parasites …là encore j’ai vu combien mon expérience professionnelle , avec ses essais-erreurs, ses tâtonnements, ses douleurs et ces incertitudes est précieuse. Je me rends également compte que vivre les difficultés d’une équipe fait que je m’y attache : j’ai souffert avec eux, j’ai été soulagée avec eux, j’ai ri avec eux…
L’incertitude engendrée par cette démarche rend humble. Je n’ai pas ou presque de travail tout prêt, je ne délivre pas une formation destinée à transmettre des connaissances, j’avance et je vis au rythme du groupe, prête à chaque instant à accélérer avec eux, freiner avec eux, vivre le malaise avec eux, vivre la joie et l’excitation des interactions positives et des avancées. Combien de fois je me suis dit en arrivant : Punaise, qu’est ce que tu es allée faire dans ce sac de nœuds, et au final, chaque pierre est venue se poser en son temps à l’endroit où elle devait se mettre, j’apprends à faire confiance, au processus, en Dieu, en moi-même, aux autres, ce travail est une école formidable.
J’ai eu aussi, grâce à mon collectif Du Récit au Tracé, l’occasion de faire équipe moi aussi. Nous avons, en une année vécu énormément de choses, des moments stimulants d’interactions avec des clients potentiels qui nous encourageaient, de nombreuses visites clients avec des moments d’échanges touchants, le sentiment de partager leur quotidien et leur histoire… Nous avons dû ajuster, réajuster, cibler, et nous organiser en fonction des retours et des échanges. Nous avons testé des formules, des propositions, nous avons fait des erreurs, nous avons su rebondir et nous sommes aujourd’hui plus sûres de nous et de notre produit que jamais. Nous avons pu nous entourer de partenaires compétents et qui partagent nos valeurs. 2019 sera à coup sûr, l’année d’ancrage de notre formule avec de belles perspectives qui s’ouvrent à nous.
Je me rends compte combien la posture développée en thérapie sociale permet d’apporter un espace d ’opportunité dans tous les milieux , combien chaque domaine de travail permet de toucher ce qui nous fait vibrer, avancer ou encore stopper, combien avec cette démarche on est dans la vie, la vraie (pas celle d’Auchan), combiens on se sent faire partie d’un tout, combien l’empathie avec chacun est essentielle, et qu’elle commence par l’empathie envers soi-même.
C’est accepter d’aller vers l’inconnu avec qui on est, en sachant qui on est et en ayant accepté qui on est. C’est un peu se mettre à chaque fois en position de vulnérabilité. C’est au prix de cet inconfort que l’on avance et que l’on touche du doigt les vrais nœuds, ceux qui nous font tant souffrir parfois.
J’ai eu cette année beaucoup de mercis, associés à un sentiment bizarre de ne pas avoir fait grand-chose…avant, les mercis était exceptionnels alors que j’avais l’impression d’en faire des tonnes !
L’année 2019 apparait comme un défi de taille. Il s’agit premièrement de passer le cap du statut d’entrepreneur salarié avec ses avantages mais aussi ses contraintes financières.
Il s’agit aussi pour moi de m’aventurer dans des domaines nouveaux avec de fortes attentes à la clé : l’assistance à maitrise d’usage pour accompagner des projets d’habitats participatifs, des sujets plus politiques autour des question de citoyenneté, mettre en œuvre un séminaire autour des questions d’entreprenariat en Haïti avec d’autres partenaires, et m’intégrer également dès janvier dans le champ de l’accompagnement des personnes porteuses de handicap. Attendre la réponse à des appels d’offres est quelque chose d’extrêmement insécurisant, puisqu’on ne peut pas planifier sa charge de travail pour les mois à venir. Pour quelqu’un qui aime maitriser les choses, c’est extrêmement formateur.
En même temps, j’ai appris en 2018 à lâcher prise sur pas mal de choses.
La meilleure des solutions pour avancer face à nos limites n’est-il pas de se mettre en situation ?