Nous sommes tous ouvriers avec Dieu nous dit la Bible, ce qui implique une relation de coopération avec Lui dans son oeuvre. Nous sommes des ouvriers crées à l’image de Dieu.
En effet Dieu dit dans Genèse 1 v 26-28 : Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance…Puis Dieu les bénit, et Dieu leur dit: Soyez féconds, multipliez, remplissez la terre, et l’assujettissez; et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre. Et plus loin : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, je lui ferai une aide qui soit son vis-à-vis ».
Ainsi nous sommes ouvriers ensemble pour travailler à la mission que Dieu nous a confié.
La première coopération voulue et instaurée par Dieu, est donc ce fameux vis-à-vis prévu pour être d’une efficacité redoutable pour l’oeuvre de Dieu tout en répondant à un besoin de l’homme.
Qu’implique-il dans nos interactions, et plus spécifiquement quand nous travaillons ensemble à son oeuvre ?
Ce vis-à-vis nous permettrait-il de vivre ce que Dieu a prévu quand il nous propose d’être membres les uns des autres ?
L’intention divine
Créés à l’image de Dieu, signifie que nous sommes êtres spirituels comme lui. Êtres spirituels et plus spécifiquement « être relationnels ».
Dieu est un Dieu de relation. Toute la Bible nous parle d’alliance relationnelle, que ce soit avec un peuple ou avec les individus.
Comme l’homme est à l’image de Dieu donc un être de relation, Dieu a trouvé cela naturel de lui créer un vis-à-vis.
La solitude n’est pas bonne selon Dieu, soit, mais est ce uniquement pour cette raison que Dieu a trouvé bon de créer un vis-à vis à l’homme ?
Petite précision, quand on parle de l’homme ici, on retiendra la traduction de la nouvelle Bible second dans laquelle il est écrit : Dieu créa les humains à son image. Il les créa à l’image de Dieu ; homme et femmes il les créa. En traduction littérale : Dieu créa L’adam à son image, il le créa à l’image de Dieu. Il les créa mâle et femelle. Le grand dictionnaire de la Bible chez Excelsis nous indique qu’Adam est utilisé à la fois comme nom propre et comme nom commun « humain », notamment lorsqu’il est utilisé avec l’article ha-adam, dans les 26 occurrences faites dans genèse 1 à 3.
Dieu veut plus que sauver l’humain de sa solitude. Il juge bon de lui créer une aide qui soit son vis-à vis.
Les différentes traductions de la Bible nous parlent : d’une aide qui soit semblable à lui, d’une aide qui lui corresponde, d’une aide qui soit son vis-à-vis, ou encore une d’aide qui lui convienne parfaitement.
La Bible en français courant va plus loin en indiquant même une notion de difficulté : « Je vais le secourir en lui faisant une sorte de partenaire. »
L’homme/l’humain seul aurait il donc besoin d’être secouru par quelqu’un d’autre que par Dieu lui-même ?
En effet dans le Psaumes 121v1 Le Psalmiste demande : D’où viendra mon secours ? (Aide) ? Mon aide (ézèr) me vient de l’Eternel qui a fait ciel et terre.
Le mot « ézèr » utilisé ici et sa forme masculine indique que l’aide envisagée n’est pas encore la femme que Dieu créera plus tard ; il amène d’abord à Adam les animaux pour qu’ils l’assistent dans sa tâche de cultiver et de garder le jardin. Ce mot est employé par Dieu lorsqu’il vient en aide à l’homme. Il n’y a donc aucune nuance dépréciative.
Donc il n’est pas bon que l’homme soit seul, soit, mais il n’est aussi pas bon que l’humain soit seul..
Dans quel domaine l’humain aurait il besoin d’être secouru ?
L’Ecclésiaste nous en donne une indication au chapitre 4 v 9 et 10 : Deux valent mieux qu’un, parce qu’ils retirent un bon salaire de leur travail. Car, s’ils tombent, l’un relève son compagnon; mais malheur à celui qui est seul et qui tombe, sans avoir un second pour le relever!…
Et l’on pourrait même imaginer que l’auteur de l’Ecclésiaste sait de quoi il s’agit puisqu’il à la fin de sa vie, sans plus aucun vis-à-vis céleste, on dirait qu’il est tombé lui aussi.
Comment peut on être une aide pour quelqu’un en jouant ce rôle de un vis-à-vis ?
Le vis à vis, un secours nécessaire
Nous avons donc besoin de vis-à vis, semblable à nous, qui nous corresponde et nous convienne parfaitement afin d’être secouru. Tant qu’à faire, utilisons toutes les traductions de la Bible !
Soit, mais pour être secouru de quoi, et/ou de qui ?
La Fenêtre de Johari créée par Joseph Luft et Harrington Ingham en 1955 sert à classer les différentes informations sur une personne :
- Les informations dont la personne dispose sur elle-même (zone publique et cachée)
- Les informations dont elle ne dispose pas (zone aveugle et zone inconnue)
Nous voyons dans ce schéma qu’une grande partie de nos actions et réactions sont activées par nos zones aveugles et inconnues.
De ce fait, les informations dont nous ne disposons pas consciemment interagissent avec les autres sans que nous le voulions. La peur notamment, joue un grand rôle dans nos décisions, fonctionnant comme un levier et un guide, alors que ne le voyons pas.
Nous avons donc besoin d’être secouru de nous mêmes et de ce qui nous meut inconsciemment (fausses croyances, forteresses de pensées, peurs diverses…) qui précède nos actions et nos réactions.
Comment ? En nous laissant interpeller par nos vis-à-vis. Vis à vis veut dire : en face de… donc comme un miroir !
La Parole nous partage à certains endroits cette image du miroir et se présente elle même comme un miroir pour nos vies. Les vis-vis doivent donc nous rappeler cette Parole.
Dietrich Bonhoeffer nous l’explique : « Telle est la volonté de Dieu : nous sommes tenus de chercher et de trouver sa parole dans le témoignage du frère qu’il met près de nous, en écoutant une parole humaine. Le chrétien à donc absolument besoin des autres chrétiens ; ce sont eux qui peuvent vraiment et toujours à nouveau lui ôter ses incertitudes et ses découragements. En voulant s’aider lui-même, il ne fait que s’égarer d’avantage. Il lui faut la présence du frère dont Dieu se sert pour lui porter et lui annoncer sa parole de salut. Il en a besoin à cause de Jésus-Christ. Car le Christ que nous portons dans notre propre coeur est plus faible que celui qui nous apporte la parole ; L’un est sûr, l’autre ne l’est pas. Le but de toute communauté chrétienne apparaît ainsi clairement ; elle nous permet de nos rencontrer pour nous apporter mutuellement la bonne nouvelle du salut. »
L’édification passe par des feed-backs constructifs de nos frères et soeurs dont le miroir brisé à été parfaitement restauré par Dieu. Ces retours, connectés à Dieu, ce font à l’image du Créateur qui nous voit, comme des personnes justifiées par grâce, aimables, compétentes et importantes. Au delà d’un retour conditionnels sur ce que nous faisons, qui doivent nous faire évoluer, le retour sur qui nous sommes reflète le regard d’amour du Dieu sur nous et nous conforte dans notre identité en Christ.
C’est ainsi que nous vivons concrètement le terme être membres les uns des autres, dans cet esprit de vulnérabilité confiante et d’édification.
Pour vivre en membres les uns des autres
Vivre en membres les uns des autres, active cette part de vulnérabilité confiante réciproque et donc ce vis-à-vis, en face de..qui nous permettront de faire les feed-back constructifs nous aident à diminuer la zone aveugle et la zone inconnue notamment.
Mais paradoxalement, ce sont encore ces deux zones qui entravent bien souvent cette capacité d’être membres des uns des autres justement, dans cet esprit de vulnérabilité confiante réciproque et de miroir.
Il s’agit donc aussi de nous connaître nous-mêmes par le Créateur qui nous révèle notre identité pour mettre une triple dose d’intention dans nos relations d’interdépendance.
Dans les assemblées que je côtoie ou que je fréquente, être membres des uns des autres, est parfois confondu avec : être membres de la même église.
Un peu d’édification lors de l’étude biblique, un rappel du haut de la chair, une organisation de responsables et d’équipiers pour se donner des tâches communes, mais peu de temps formalisé pour pouvoir fonctionner en vis à vis construits. Un : « ah c’était chouette aujourd’hui ! » entre deux portes, et : « merci pasteur pour le message, » ne suffit pas.
Il s’agit de pouvoir créer des formaliser des espaces temps de vis-à-vis pour pouvoir dire à l’autre, ce qu’on voit de lui, ce qu’on entends de lui, ce qu’on ressens de lui. Bref faire le travail de miroir.
Ok me direz vous, mais comment savoir que l’autre, le fameux miroir est bien intentionné, bien positionné, et ne fonctionne pas avec sa zone aveugle justement ?
Dans le cadre prévu par Dieu
Vous me direz en plus, en me pointant les deux premiers vis-à-vis ayant existé : « Ces deux premiers vis-à-vis là, n’ont pas travaillé à l’ouverture de conscience réciproque, au contraire ils ont coopéré pour créer et précipiter leur chute ».
Ils n’ont pas fonctionné en miroir.
Nous voyons ici, qu’à partir du moment où le péché à pris place, la connexion avec Dieu s’est brisée, le miroir s’est cassé, obscurci et n’a plus joué son rôle.
Dieu avait créé un cadre pour le vis à vis. Il leur avait attribué une mission dans laquelle ils devaient s’entraider, se secourir et s’édifier mutuellement, bref coopérer.
Cela fonctionnait en vis à vis avec Dieu qui parcourait le jardin pour échanger avec ses deux ouvriers/administrateurs.
Ici nous apprenons que nous ne pouvons jouer le rôle de vis-à-vis pour les autres qu’en étant connecté à Dieu.
Dieu est notre premier vis-à-vis. C’est lui qui nous permet d’être des vis à vis les uns pour les autres. Il nous permet aussi de recevoir les vis-à-vis comme une valeur ajoutée pour notre marche spirituelle.
C’est l’Esprit Saint qui transforme nos interactions en tremplin pour la maturité spirituelle.
Michel Blanc, théologien, nous le rappelle : « Et nous devons savoir que, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, chacun de nous a pour sa part un rôle à jouer pour la construction de nos communautés. »
En conclusion, je dirais que les clés de la coopération sont dans cette citation de Lucie Grasmuck :
« Le chrétien sait qu’il sert la communauté lorsque son contact s’enrichit avec Dieu et qu’il est en communion aussi étroite avec son Sauveur dans le feu de l’action que dans le silence de la prière. Mais n’oublions jamais son rôle de simple instrument entre les mains de Dieu, et, toujours plus préoccupé d’actions en profondeur que d’activités en surface, il ne partira pas vers la tâche sans l’inspiration d’en haut, il se souviendra qu’un des formes les plus nécessaires de son service est le ministère secret de l’intercession. »
Bibliographie :
Sous la direction de Michel Blanc, Pour une bonne gouvernance dans les églises, Olivetan, 2016
Dietrich Bonhoeffer, De la vie communautaire, Labor et Fides, 1995
Laurent Descos, Adam et Eve : qui porte la culotte ? – YouTube
Lucie Grasmuck Dans le secret, 31 méditations dédiés à ceux qui travaillent pour les âmes, 1933